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Les interactions entre l’architecture et la philosophie sont un fait historique, si ancien que les domaines eux-mêmes, et incontournable pour ses identités contemporaines. Les théoriciens et praticiens de l’architecture assimilent la philosophie dans son discours pour formuler, contextualiser, questionner, et clarifier les sujets pressants de leur profession, ou tout simplement comme un stimulant conceptuel qui génère de nouvelles idées. Les philosophes, d’habitude plus motivés par l’enthousiasme des architectes que par un intérêt propre et spontané, parlent aux architectes mais pas forcément de l’architecture, en utilisant en revanche comme moyen d’illustrer, informer, développer, et appliquer leurs pensées philosophiques qui sont, presque par hasard, pertinentes pour l’architecture aussi. Ainsi, cette relation mutuellement bénéfique se déroule très différemment en architecture et en philosophie, dès les approches que chacun emploie pour adresser l’autre aux raisons de le faire, de sorte que, souvent, même quand ils semblent s’engager réciproquement en fait ils restent dans eux-mêmes. Mais de fois ces interactions sont aussi intersections, moments où un architecte et un philosophe se rencontrent et, à travers eux, les particularités de leurs disciplines sont forcées de se confronter, de se défier et d’être défiées directement par l’autre. Une intersection de ce type a engendré le livre Les objets singuliers : architecture et philosophie (2000), la transcription de deux conversations entre l’architecte Jean Nouvel (1945-) et le philosophe Jean Baudrillard (1929-2007) dans lesquelles les deux discutent de projets et écrits, d’architectes et de philosophes, d’architecture, de philosophie, des connexions entre eux, et une panoplie de sujets dans leur difficile mais vaste superposition. Les leçons de ces transcriptions, à vrai dire, dépassent les matières abordées par les protagonistes : en analysant pas seulement ce qui est échangé mais l’échange lui-même en tant que tel, ce dialogue se présente comme un exemple extraordinaire des motivations et mécanismes à la base de la relation entre les domaines. Son étude méthodologique dévoile des contributions instrumentales pour d’autres interactions, autour d’autres projets et écrits, par d’autres architectes et philosophes, pour adresser d’autres sujets, par nous, aujourd’hui.