Are you an EPFL student looking for a semester project?
Work with us on data science and visualisation projects, and deploy your project as an app on top of Graph Search.
La majorité des instances de la coopération transfrontalière sont acquises aux bienfaits de l’« ouverture » des frontières nationales. Une telle stratégie institutionnelle, qui doit beaucoup à la recherche dans les border studies ces quelques dernières décennies, suppose – pour ses tenants – une intégration progressive des populations voisines « artificiellement » séparées. De plus forts échanges (de personnes, de capitaux, etc.) entraîneraient une plus grande cohésion sociale de l’ensemble. Malgré cela, des occasions existent pour constater toute l’ambivalence qui se joue derrière de telles ambitions politiques libérales. En 2014, le Mouvement Citoyen Genevois réalise des scores historiques dans le canton de Genève grâce à une campagne ouvertement « anti-frontaliers ». Plus récemment, la pandémie du COVID-19 entraîne une fermeture dure des frontières et nourrit les discours autoritaires de certains chefs d’États (Schwartzburg, 2020). Ces occasions nous rappellent que le registre de la frontière – ou des frontières – opère encore dans une fonction protectrice pour une certaine partie de la population dans certaines circonstances, qu’il s’agisse d’un marché de l’emploi saturé ou d’un risque de santé publique. De telles peurs feront encore les affaires d’une extrême-droite à la rhétorique xénophobe tant qu’elles ne seront pas légitimées par d’autres formes de prises en considération. Cette communication se base sur les premiers résultats d’une enquête téléphonique menée dans le cadre d’un projet du Fonds National de la recherche Suisse sur « les communs transfrontaliers ». Sur la base d’un échantillon de 3'200 personnes – réparties entre l’agglomération du Grand Genève franco-suisse, l’Eurométropole Lille-Courtrai-Tournai franco-belge et le Pays Basque franco-espagnol – le questionnaire s’attache à discerner le(s) rôle(s) de la frontière nationale pour les personnes qui s’y confrontent au quotidien. La présentation se déroulera en deux temps. Tout d’abord, nous reviendrons sur les modalités des réactions conservatrices identifiées. Plutôt que les composantes cumulables d’une attitude nationaliste, l’affirmation d’un attachement au territoire local, la distinction entre « étrangers » et « voisins » ou la préférence accordée au pays de résidence sont autant de manières spécifiques de prendre position à propos d’espaces géographiquement et socialement délimités. Dans un second temps, il sera question de distinguer la population enquêtée sur ces opinions particulières en matière de caractéristiques socioéconomiques. Ce « regard situé » sur la frontière nationale est non seulement révélateur d’une position sociale particulière (Cassidy et al., 2018) mais également de hiérarchies socio-spatiales que cette frontière – ou ces frontières – participent à perpétuer. Références Cassidy K., Yuval-Davis N. & Wemyss G. (2018), Debordering and everyday (re)bordering in and of Dover: Postborderland borderscapes, Political Geography 66, 171-179. Schwartzburg R. (2020), Wendy Brown : « Les frontières ne sont pas des gestes-barrières », AOC, consulté le 11.06.2020.