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La présente communication s’intéresse aux modalités par lesquelles les habitant.e.s des agglomérations transfrontalières engagent leur présence de part et d’autre d’une frontière nationale. Elle a pour ambition de remettre en question la vision dichotomique traditionnelle qui distingue les frontaliers nationaux d’une part des frontaliers transnationaux d’autre part (Martinez, 1994). Pour ce faire, nous mobilisons la notion de mode de vie, soit « la composition – dans le temps et l’espace – des différentes activités et expériences qui donne sens à la vie d’une famille » (Thomas & Pattaroni, 2012), en l’appliquant au contexte transfrontalier. Nous soutenons que les modes de vie transfrontaliers ne s’appréhendent pas uniquement à travers la géographie des activités et des déplacements quotidiens. Nous postulons que leur spatialisation se construit aussi selon l’étendue des sociabilités, les points d’ancrages émotionnels ou encore les barrières administratives. Ce travail fait partie d’un projet de recherche financé par le Fonds National de la Recherche Suisse, qui s’appuie sur une démarche de recherche mixte dans trois espaces transfrontaliers européens : le Grand Genève franco-suisse, l’Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai francobelge et le Pays Basque franco-espagnol. La communication se base à la fois sur un corpus d’environ 40 entretiens biographiques et sur une enquête pilote (300 répondants) d’un plus vaste questionnaire téléphonique (3'600 répondants). Dans les deux cas, l’accent est aussi bien mis sur les représentations identitaires, politiques et sociales que sur les pratiques spatiales concrètes. Dans un premier temps, nous exposerons les résultats de l’enquête qualitative en cours. Celleci nous conduit à dépasser l’opposition « frontalier – transfrontalier » et proposer différentes manières d’engager sa présence de part et d’autre de la frontière, c’est-à-dire de ne plus « se référer de manière exclusive, soit au pays de départ, soit au pays d’installation ou à chercher un subtil équilibre entre les deux » (Barou, 2012). Nous parlerons plus volontiers d’une négociation quotidienne entre « ici » et « là-bas » qui implique des arbitrages aussi bien fonctionnels que sociaux, sensibles ou administratifs. Dans un second temps, et dans une approche par triangulation, nous exposerons les premiers résultats de l’enquête quantitative pilote. Elle permet une première typologie exploratoire des modes de vie transfrontaliers qui articule les modalités de double présence aux caractéristiques individuelles des ménages. La structure des données nous offre la liberté de révéler ces modalités par un ensemble d’informations qui dépassent les simples pratiques spatiales. Cette proposition d’approche mixte par les modes de vie montre comment la frontière nationale, en tant que limite signifiante et performée, intervient toujours dans le déploiement des pratiques et des expériences des habitant.e.s des espaces transfrontaliers. Les différentes modalités de double présence qui en découlent nous incitent à étudier plus finement les divisions sociales, urbaines et politiques infra-territoriales que leur diversité génère.