La notion d’intellect agent vient du commentaire d'Averroès, dans son exégèse du traité d’Aristote, De l'âme, III, 5, où sont employés les mots , rendus dans la version arabo-latine par « » : de là provient l’expression latine dérivée de l’arabe, pour traduire le grec . Selon Augustin Mansion, L’expression grecque d’Aristote désigne exactement la fonction productrice de l’Intellect. Ce n'est pas encore la pensée ni l’activité de penser, mais la fonction qui produit les formes intelligibles (noêta), les entités abstraites (dont theos - le divin) requises à l’exercice de la pensée : elle permet la saisie de l'intelligible, du pensable, comme la lumière permet la saisie du visible, du perçu. L'expression d’« intellect agent » ou « actif » provient d’une traduction fautive, passée dans l’usage de la scolastique ; elle induit en erreur : il ne s’agit pas de l’activité de penser dans chaque homme individuel, mais de la pure essence de l’Intellect à l’état séparé. Car l'intelligence humaine ne peut, selon Aristote, se porter directement sur les Formes intelligibles qui subsistent par elles-mêmes. C’est pourquoi cette fonction productive relève du domaine de l’âme humaine ; c’est un principe actif conçu comme immanent et transcendant à la fois. Il se distingue de l'intellect patient (ou passif) qui ne fait que recueillir les connaissances venues des sens. Aristote le présente en effet comme transcendant, il paraît échapper à notre pensée consciente d'homme, aux images, au corps, car il est (De l'âme, III, 5, 430 a 18), toujours en acte, (De l'âme, III, 5), et il vient du dehors dans le corps du fœtus (Génération des animaux, II, 3, 736 b 28). L'âme a quatre facultés : nutritive (végétative), sensitive (perceptive), appétitive (motrice), intellective (cogitative). . L'âme intellective (l'esprit cogitatif, la partie pensante) comprend un « intellect patient » (passif) et un « intellect agent » (actif) : . L'expression "intellect patient" (noûs pathêtikos) vient d'Aristote , comme "intellect agent" , encore qu'Aristote dise "intellect impassible" (noûs apathês), et Alexandre d'Aphrodise "intellect créatif" (noûs poiêtikos).
Luc Patiny, Philip Gregory Jessop