Jean-François Lucas
Dans cette communication, nous soutiendrons que les utopies qui ont accompagné l’émergence des mondes dits virtuels se sont estompées dès leurs premiers usages. Nous ferons l’hypothèse que nous sommes actuellement au début de la phase d’acculturation de ces solutions socio-techniques, qui permettent aux individus, au-delà de se rêver autrement ou de se réinventer un monde qui leur offre des possibles, d’y agir, de s’y socialiser et même d’y réaliser et d’y cristalliser leurs propres rêves. Après avoir rapidement introduit la notion de « monde virtuel », nous présenterons les trois phases du processus de diffusion d’une innovation selon Victor Scardigli (1992), en précisant les limites de la transposition de ce modèle à notre objet d’étude. Nous évoquerons l’ambivalence des imaginaires et les grandes utopies qui ont entouré la diffusion de ces univers, à partir de sources provenant de différents acteurs : concepteurs, publicitaires, « littérateurs », etc. (Flichy, 2001). Nous expliquerons que ces imaginaires ne sont pas spécifiques aux mondes virtuels, mais qu’ils sont relatifs aux technologies de l’information et de la communication, et plus précisément à la figure du réseau (Musso, 2000). Nous noterons cependant des imaginaires spécifiques autour de la notion d’avatar. Ensuite, à l’image du travail de Victor Scardigli à propos de différentes figures du « progrès », nous soutiendrons que les utopies véhiculées lors de l’apparition des mondes virtuels se sont rapidement essoufflées, notamment parce que les premiers usages ne les ont pas incarnées. Alors, nous expliquerons que, si les mondes virtuels permettent à des usagers d’être projetés, de se projeter ou encore de se socialiser dans ou par l’intermédiaire d’univers fictionnels imaginés et façonnés par des concepteurs, le développement de mondes dits « ouverts » renouvelle les possibilités pour les utilisateurs pour modéliser, incarner et réaliser leurs propres rêves.
2017