Le gouvernement des juges est une expression du professeur de droit Édouard Lambert, apparue pour la première fois dans son ouvrage Le gouvernement des juges et la lutte contre la législation sociale aux États-Unis (1921), et qui désigne le fait pour un juge de privilégier son interprétation personnelle au détriment de la lettre de la loi.
Dans un sens plus large, la notion de « gouvernement des juges » est une critique d'une tendance occidentale actuelle qui consiste à laisser au judiciaire des décisions qui "devraient normalement relever du politique".
En 1803, dans l'arrêt Marbury v. Madison, la Cour suprême des États-Unis s'autoproclame compétente pour annuler les lois qu'elle juge inconstitutionnelles. Le président Thomas Jefferson critique cette décision, considérant que ce pouvoir place l'Amérique : « sous le despotisme d'une oligarchie ».
En 1921, Édouard Lambert publie Le Gouvernement des juges et la lutte contre la législation sociale aux États-Unis, qui aura une certaine incidence dans ce pays.
La question prend de l'ampleur dans les années 1930, avec l'opposition de Franklin Delano Roosevelt à la Cour suprême dans l'optique du vote de réformes qu'il estimait nécessaires pour faire face à la crise de 1929. En anglais, les américains parlent d'activisme judiciaire (:en:judicial activism).
Le souci d'éviter un gouvernement des juges était déjà présent sous la Révolution française comme l'atteste la procédure du référé législatif mise en place en 1789, selon laquelle le juge devait s'adresser au législateur s'il y avait nécessité d'interpréter la loi. Inspirée par la pensée de Montesquieu, qui estimait que les magistrats devaient simplement faire appliquer la loi telle qu'elle est, la Révolution a limité grandement le pouvoir des juges. Sous l'Ancien Régime, les cours de justice, appelées des parlements, essayaient systématiquement d'accaparer le pouvoir du roi à leurs propres fins, par l'utilisation de la procédure d'enregistrement des lois : alors que l'enregistrement n'était au départ qu'une simple formalité, les parlements refusent d'enregistrer la loi qui leur déplaît, entraînant une crise qui ne se résolvait que par la soumission du roi ou du parlement (lorsque le roi tenait un lit de justice).